Mon compagnon de vie qui supporte avec philosophie parfois et résignation souvent, ma passion du vin, m’a offert un livre sur le vin (alors qu’il me dit régulièrement que je devrais élargir ma vision du monde à d’autres univers!).
Il m’observe, il me laisse faire, devant ce plaisir singulier où je vais devoir trouver en 1 ou 2 jours les 4 vins qu’il me faut à tout prix pour la semaine prochaine. Il discute ou pas avec les vignerons. Préférant souvent la beauté des ruelles à celle des chais, les formes et la couleur de leurs pierres, l’asperité d’une porte moyenâgeuse, une toiture à la forme étrange, une vieille femme qui passe courbée par le travail, un homme aux mains usées qui bricole dans son atelier. Moi c’est un verre qui me permet de fixer ma mémoire et lui c’est plutôt son appareil photo. Bref, il a eu envie de me faire plaisir et a choisi ce livre : Les raisins de la misère de Ixchel Delaporte aux éditions du Rouergue.
Ce qu’elle explique, je l’avais ressenti en flyant pour mes cours d’œnologie sur le Libournais autour de Montagne et Puisseguin saint Emilion. J’avais été étonnée de voir les chiffres INSEE de cette région. Mais je n’avais pas fait le lien direct avec la vigne. Je savais aussi que le Médoc était très pauvre, mais dans mon esprit c’était plutôt dans le Bas-Médoc, pas dans le Haut.
Lors d’une visite dans les grands châteaux de Pauillac, on avait décidé avec l’élu de mon cœur de rester deux jours au camping municipal du village. Et là surprise, la pauvreté du village, m’a saisi. Le contraste entre les grands châteaux et cette misère sociale au bord de ce grand fleuve, au cœur même du village, c’était trop décalé. Dans tous les livres que je lis autour du vin du Bordelais ou d’ailleurs, bien peu traitent de ceux qui travaillent la vigne comme salariés. On en a un aperçu avec les écrits sur les grandes émeutes vigneronnes languedociennes de 1907. Mais la révolte était liée à une crise de surproduction qui suivait le phylloxéra. Une période difficile pour les salariés viticoles, une période où les grands négociants sétois et bordelais mettaient en concurrence vins algériens et vin languedociens pour des raisons de coût de main d’œuvre.
En 2019, les grands châteaux du Bordelais, de Bourgogne ou de Champagne se portent bien, mais pas les petits domaines, pas les salariés saisonniers. Vous vous intéressez au vin? Lisez ce livre, il ouvre les yeux sur une réalité peu éclairée.
https://www.france.tv/france-3/un-livre-un-jour/780659-les-raisins-de-la-misere-une-enquete-sur-la-face-cachee-des-chateaux-bordelais-de-ixchel-delaporte-la-brune-au-rouergue.html